Notre autorité est notre propre conscience

Déclaration de l’Atelier libertaire Alfredo López de La Havane

En tant qu’anarchistes, nous croyons qu’une Constitution, telle qu’elle est comprise dans la culture hégémonique, n’est pas une norme qui garantit un pacte social indépendant des vices autoritaires, des noyaux de pouvoir, ni à des discriminations. Et encore moins, elle ne pourra jamais nous représenter. À Cuba, nous avons aussi une histoire d’échecs constitutionnels qui ont engendré plus de frustrations que de réalisations pratiques. Le modèle constitutionnel cubain actuel accentue tous ces fléaux, puisqu’il structure un Parlement, dont la nomination est composée d’à peine 49 % de délégués élus au suffrage populaire, mais tous dominés par un parti unique.

Néanmoins, nous ne sommes pas étrangers aux processus sociopolitiques qui ont été générés par la constituante actuelle et à ses possibilités de délibération, de dialogue, d’échange d’idées, d’expansion de la culture juridique, en particulier au niveau communautaire.

C’est pourquoi nous souhaitons partager notre vision du processus.

Rédaction de l’avant-projet de Constitution

Le manque de transparence est évident dans le processus de rédaction du projet qui a commencé inconsciemment et avec des législateurs inconnus, bien avant que la Commission de rédaction ne soit officiellement nommée.

Il n’y a pas eu de participation citoyenne initiale lorsqu’il s’est agi d’inclure ou de modifier les contenus.

Consultation populaire et traitement des données

Les délibérations supposées se sont converties en un processus de réception de demandes, sans qu’il soit nécessaire d’argumenter publiquement.

Les délibérations ont été organisées sur la base d’inégalités structurelles entre les participants.

Les spécialistes ont pris soin de délimiter les propositions en propositions correctes ou en propositions incorrectes, sur la base d’arguments idéologiques déguisés en technicité.

La méthodologie exacte pour la classification des interventions et des arguments n’est pas connue et son incorporation dans le texte constitutionnel et, en tout état de cause, un processus de simplification a été nécessaire, ce qui a réduit la richesse qualitative des discussions à une dimension purement quantitative.

Même si nous ne connaissons pas l’obscure dramaturgie de la Commission parlementaire, il est évident pour nous que les législateurs ont été traités avec des normes extra-légales, imprégnées de convictions morales et religieuses jamais explicites.

Débats parlementaires

Ils étaient caractérisés par l’autocensure typique, la guataconeria (1), l’unanimisme ; et ils ont montré le peu de préparation professionnelle des délégués.

Les procédures de fonctionnement de l’Assemblée ont été violées et les débats ont été accélérés.

Corps de la Constitution

Des droits déjà consacrés dans la Constitution actuelle et les Constitutions précédentes ont été affectés.

Les restrictions aux libertés artistiques, politiques, d’association, de réunion, de presse, d’objection de conscience et autres restent en vigueur.

Il n’y a pas d’engagement explicite en faveur des droits de l’homme universels, puisqu’ils sont limités aux seuls droits “ratifiés” par le gouvernement cubain.

Les textes sont surlignés en ce qui concerne les devoirs des citoyens, tandis que les engagements de l’État sont relativisés.

On donne un statut légal à la propriété privée et à la libéralisation économique en général, alors qu’il n’y a aucune incitation pour que se développe le contrôle du pouvoir par les citoyens ou des travailleurs.

Le pouvoir du Parti communiste demeure intact, il reste en toute impunité à la direction de la société cubaine avec pour objectif l’approfondissement du capitalisme d’État, avec un nouveau système présidentiel et sous l’hégémonie traditionnelle de l’armée.

Les changements couvrent tellement de domaines qu’ils mériteraient un processus constitutif intégral.

Finalement, la campagne de l’Etat pour le oui a été un exercice autoritaire influençant le comportement des masses, comme le ferait la meilleure campagne Coca-Cola.

Pour conclure

Cette Constitution, au-delà de la rhétorique officielle, nous éloigne d’une possible construction de toute expérience de socialisation ou d’horizon émancipateur.

Par conséquent, nous qui faisons partie de l’Atelier libertaire Alfredo López de La Havane, respectons la décision de chaque personne de participer au référendum constitutionnel de la manière qu’il souhaite. #YoVotoNo #YoNoVoto #YoMeConstituyo

Atelier libertaire Alfredo López de La Havane
https://centrosocialabra.wordpress.com

1. La guataca est un instrument de percussion. Il s’agirait lorsque les rédacteurs du texte parlent de “guataconeria” de roulements de mécanique.


Enrique   |  Actualité, Politique   |  03 1st, 2019    |