Économie cubaine : état des lieux

Cuba s’enfonce actuellement dans une crise économique profonde dont les principaux paramètres sont : les errements de la gestion bureaucratique, l’embargo des Etats-Unis, la suppression de l’aide soviétique depuis une vingtaine d’années et les répercussions de la crise économique mondiale.

Ainsi, tandis que les cours du nickel (un quart de ses exportations) ont progressé nettement durant la décennie écoulée, cette manne n’a pas compensé le désastre endémique de l’agriculture et la faiblesse globale du secteur industriel. Les importations de denrées alimentaires, de vêtements, de produits énergétiques et de biens d’équipement ne sont pas financées, et de loin, par les recettes d’exportation de biens et de services, les revenus du tourisme et les transferts de fonds des familles à l’étranger.

Les autorités ont aussi rendu public un important train de réformes économiques qui mettent fin à l’emploi garanti pour toutes et tous. Après des décennies d’étatisation volontariste, le modèle économique cubain perd pied et cherche à se créer un secteur privé.

Le premier objectif était de licencier 500 000 travailleurs du secteur public, mission accomplie par le ministère du travail relayée par la CTC (Centrale des travailleurs cubains). A terme, il s’agit de supprimer 1,3 million d’emplois “superflus”, soit un quart de ceux occupés par la population active. Des listes circulent déjà dans les entreprises. Dans une déclaration du 13 septembre, la CTC admettait que le “succès” de l’opération dépendra du “consensus social obtenu par la pertinence économique et politique de ce pas”, qui rompt avec le dogme socialiste du plein-emploi.

Un document interne qui circule dans les “instances” du pouvoir à La Havane, depuis fin août, a été diffusé par l’agence Associated Press, le 14 septembre 2011. Ce “power point” de 26 pages utilise un langage technocratique truffé de citations de Raul Castro. Il attribue la nécessité du dégraissage au coût des salaires, à l’insuffisante productivité, à l’inefficacité de l’économie, à l’indiscipline et au manque de motivation des travailleurs.

Parmi les “options” proposées aux licenciés, ce document avance les coopératives et le “travail à son propre compte”. A ce jour, l’Etat emploie plus de 4 millions de Cubains. Les travailleurs indépendants ne sont que quelques milliers. Le “chronogramme” du dégraissage commence par des secteurs aussi sensibles que l’agriculture, la santé publique, l’alimentation, le tourisme et l’industrie sucrière. Une allocation de chômage esta versée pendant un à cinq mois, selon l’ancienneté.

Un “nouveau système d’impôts, plus personnalisé et rigoureux” a été mis en place, portant sur les revenus individuels, les ventes, les contrats de travail et les charges sociales. Aucune précision n’a été apportée quant à l’accès au crédit et au financement, l’importation de matières premières monopolisée par l’Etat ou la charge fiscale.

C’est peu dire qu’un demi-siècle de castrisme n’a pas formé les Cubains à l’esprit d’entreprise. Changer la donne en quelques mois est un défi. Si des possibilités de gagner honnêtement sa vie ne s’ouvrent pas rapidement, cela pourrait provoquer de fortes tensions sociales, qui ne sauraient être réglées par la répression.

La privatisation, qui ne dit pas son nom, s’accompagne de facilités pour l’investissement étranger. Un décret d’août propose des garanties de 99 ans aux entreprises étrangères qui voudront construire des resorts, des terrains de golf ou des marinas. En revanche, les paysans auxquels des terres ont été remises en usufruit disposent de contrats de dix ans.

Les secteurs rentables passent sous la coupe du Groupe d’administration d’entreprises (Gaesa), la holding des forces armées, dirigée par le colonel Luis Alberto Rodriguez, marié à la fille aînée de Raul Castro, Debora. Il y a une composante dynastique discrète mais réelle en œuvre à Cuba.

La façade socialiste est en plein démantèlement. L’unification du taux de change [deux monnaies circulent à Cuba] est en train de mettre à genoux les entreprises publiques non compétitives. L’étape suivante, ce sera l’appropriation des actifs par les élites au pouvoir, essentiellement les militaires et leur parentèle. Ça ne vous rappelle pas d’autres scénarios mis en place dans d’autres pays comme la Chine et le Vietnam ?

Les informations publiées ci-dessous proviennent du site du Ministère de l’économie et des finances français. Elles sont la preuve éclatante que le dégraissage de l’Etat socialiste a commencé à Cuba et que nous sommes en train d’assister à l’avènement d’un capitalisme cubain et multinational sous la domination d’un parti unique et d’une caste militaire toute puissante.

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La situation économique à Cuba et les relations avec la France

Cuba a entamé un processus graduel de réformes structurelles depuis 2008 qui a eu comme point d’orgue, la tenue en avril 2011 du VIe Congrès du Parti communiste cubain (1e fois depuis 1997). La nouvelle stratégie économique y est déclinée en 311 propositions. Parmi elles : l’ouverture au secteur privé et coopératives non agricoles (avec une égalité de traitement entre les secteurs public et privé), suppression du modèle de subventionnement universel qui devrait progressivement être remplacé par des subventions ciblées et poursuite des réformes agricoles. Qui plus est, le gouvernement s’est engagé à moderniser des structures de l’Etat (séparation des fonctions régaliennes de celles de production) et à réduire le poids des dépenses publiques (suppression d’emplois publics). Ces réformes visent à assainir les finances publiques afin d’adapter le pays à un environnement international globalisé.

Et pour cause, l’économie cubaine connait de nombreuses fragilités. Selon les données publiées par la CEPAL, le taux d’investissement ne représente que 8 % du PIB, là où il conviendrait qu’il se situe entre 20 et 30 %. La dépense publique dans l’économie reste très importante, ce qui a conduit à un profond déficit budgétaire (-6,7% en 2008 et -4,3% en 2009)En 2010 et 2011, le déficit budgétaire est réduit à 3,8 %Les rendements agricoles sont très faibles et la production sucrière a été divisée par 8 en 10 ans. L’île importe plus de 70 % de sa consommation dans un contexte d’envolée des prix mondiaux(l’indice FAO des prix alimentaires s’accroit de 6 % entre juin et juillet 2012. A Cuba, les prix des produits agricoles ont augmenté de 19,8 % en 2011). Enfin, la dynamique démographique est négative ce qui devrait augmenter le taux de dépendance. La classe d’âge des personnes actives (15 – 59 ans) passera de 7,3 millions à 5,6 millions entre 2011 et 2035. Parallèlement, 3,6 millions de personnes auront plus de 60 ans en 2035 contre 2,0 millions en 2011.

Néanmoins, le pays commence à engranger les premiers bénéfices des réformes. La croissance économique atteint 2,1% au cours du 1e semestre 2012, contre +1,9 % sur la même période en 2011Pour l’ensemble de l’année 2012, l’objectif de croissance est de 3 %Le nombre de travailleurs dans le secteur privé a doublé depuis 2010 pour atteindre 390 775 en juillet 2012. Au cours des 5 prochaines années, le secteur non-étatique pourrait représenter 40 à 45 % du PIB. Enfinplus de 47 000 prêts bancaires ont été octroyés à des particuliers (essentiellement pour les activités liées à la construction) entre décembre 2011 et juin 2012.

Basée en grande majorité sur l’offre de services, l’économie cubaine présente de belles perspectives concernant notamment les secteurs du tourisme et des biotechnologies. En ce qui concerne les investissements directs étrangers, la directrice des finances du ministère du Commerce extérieur et des Investissements étrangers (MINCEX), Mme Yamila Fernandez del Busto, a annoncé la modification pour décembre 2012, de la loi sur les investissements (Loi 77). L’Etat souhaite donner la priorité aux secteurs de l’économie générateurs de devises et espère que les grands projets d’infrastructures en cours auront des effets d’entrainement sur l’activité productive.

Cuba bénéficie de nombreux atouts, notamment dans le secteur des biotechnologiesdes services, de la santé et du tourisme. Son industrie extractive offre un potentiel intéressant (pétrole et gaz); en particulier dans le nickel (3e réserves mondiales prouvées de nickel) et le cobalt. Le PNUD classe le pays au 51e rang mondial en termes d’indice de développement humain (0,776). Cuba, la plus grande île de la région des Caraïbes, est situé au carrefour entre l’Amérique latine et les Etats-Unis. Le pays est membre fondateur de l’ALBA (Alliance Bolivarienne pour les peuples d’Amérique) et de la CELAC (Communauté d’États latino-américains et caraïbes).

Depuis l’arrivée au pouvoir en 1999 du Président vénézuélien M. Hugo Chavez, Cuba et le Venezuela connaissent une convergence politique qui favorise le rapprochement économique. Au service de cette alliance entre les deux pays, le savoir-faire cubain (santé, éducation, etc.) et la pétro-diplomatie vénézuélienne. L’accord de coopération économique intégral « Convenio integral de cooperación », signéen octobre 2000, a propulsé le Venezuela au 1e rang des partenaires économiques de Cuba (36 % de part de marché en 2010). Cuba n’en reste pas moins ouverte sur le monde, comme en témoigne la montée en puissance de la Chine et du Brésil. A la fin janvier 2012, la Présidente du Brésil, Mme Dilma Rousseff, a entamé sa tournée internationale par Cuba avec l’objectif d’approfondir les relations économiques entre les deux pays. Dans la foulée de cette visite, le Brésil a octroyé à Cuba 600 MUSD pour financer ses importations de produits brésiliens (400 MUSD pour l’alimentaire et 200 MUSD les biens d’équipements)En outre, le Brésil finance 75 % (683 MUSD) du coût de rénovation du port de Mariel (située à 45 km à l’Ouest de La Havane).

La France est relativement bien implantée sur l’îleEn 2011, les exportations françaises vers Cuba se sont élevées à 202,6 MEUR, portées par la remarquable croissance des produits agricoles qui représentent aujourd’hui la moitié de la valeur de ce flux.

L’Ambassade de France à Cuba œuvre pour renforcer les relations bilatérales et soutenir les entreprises françaises à l’international. En son sein, le Service économique de La Havane a pour mission de :

Suivre les enjeux macroéconomiques et financiers en liaison avec le Service économique régional basé au Panama

- Développer la relation économique institutionnelle bilatérale franco-cubaine.

- Appuyer et valoriser l’offre et la présence des entreprises françaises à Cuba.

- Analyser les relations de Cuba avec son environnement régional et notamment promouvoir les relations avec les départements français d’Amérique (Guadeloupe, Martinique et Guyane)

Assouplissement de la politique migratoire cubaine

Les autorités cubaines ont publié le 16 septembre 2012, le décret-loi n°302 (gaceta n°44) qui modifie la loi migratoire n°1312 datant du 20 septembre 1976. Cette réforme migratoire était l’une des mesures les plus attendues par les Cubains. Elle supprime le permis de sortie et la lettre d’invitation qui étaient jusqu’alors nécessaire aux Cubains désireux de se rendre à l’étranger. Désormais, seul le passeport en cours de validité est nécessaire aux Cubains qui souhaitent voyager. Le passeport aura une validité de deux ans et sera renouvelable 2 fois pour une durée totale de 6 ans. Autre avancée, la durée du séjour à l’étranger est rallongée de 11 mois à 24 mois.

Certaines catégories professionnelles – cadres supérieurs, dirigeants, médecins, ingénieurs, sportifs de haut niveau et toutes personnes qui exercent des activités jugées vitales pour le développement du pays – resteront soumises à une autorisation préalable de voyage. Les autorités justifient ces restrictions par le besoin de préserver le capital humain du pays.

Les Cubains immigrés peuvent à présent rester jusqu’à 90 jours à Cuba (contre 30 jours auparavant). Les Cubains qui ont le statut de résident à l’étranger (notamment en cas de mariage avec une personne étrangère), peuvent eux séjourner à Cuba  jusqu’à 180 jours (contre 90 jours initialement). Dans les deux cas, les autorités peuvent prolonger le séjour si besoin. Les étrangers qui possèdent ou acquerront un bien immobilier à Cuba pourront bénéficier d’un visa de « résidents immobiliers ». La nouvelle loi migratoire entrera en vigueur 90 jours après sa publication, soit à partir du 14 janvier 2013.

Près de 1,5 million de Cubains et leur descendance vivent à l’étranger. Selon les observateurs privés, les transferts privés monétaires s’élèveraient à 2 Mds USD (1 Md USD passerait par les canaux officiels et 1 Md USD par les canaux informels), niveau équivalent aux transferts non monétaires (2 Mds USD). Des travaux théoriques et empiriques montrent que souvent à leur retour, les migrants temporaires ont une plus forte propension à investir grâce à l’épargne accumulée à l’étranger et à partager les connaissances acquises au cours de leur séjour à l’étranger. Pour Cuba, ses comportements pourraient servir les nouvelles activités en compte propre.

Le secteur du tourisme à Cuba

Le secteur touristique poursuit sa croissance au cours des 8 premiers mois de l’année 2012. Sur la période, 2,0 millions de touristes ont visité l’île, soit une augmentation de 5,2 % par rapport à la même période en 2011. En revanche, le rythme de progression s’est légèrement ralenti (+8,6 % au cours des 8 premiers mois de 2011 par rapport à 2010). Les prévisions du ministère cubain du Tourisme sont de 2,9 millions de touristes en 2012, soit une augmentation de 7 % par rapport à 2011.

Le Canada se maintient largement au premier rang des pays émetteurs de touristes (39,9 % du total). Il est suivi par la diaspora cubaine (13,1 %), le Royaume-Uni (5,1 %), l’Italie (3,8 %), la France (3,7 %), l’Argentine (3,7 %), les Etats-Unis (3,5 %), l’Allemagne (3,5 %), la Russie (2,8 %) et l’Espagne (2,8 %). Les marchés les plus dynamiques sur la période 2009/2011 sont la Russie (+45 %), l’Argentine (+25 %) et les Etats-Unis (+18 %). Le rythme de croissance du tourisme à Cuba en 2011 (+7 %) a été nettement supérieur à celui de la région caribéenne (+4 %). Avec 2,7 millions de touristes en 2011, Cuba est en volume la deuxième destination des Caraïbes (13 % du total de la région, hors Porto Rico), après la République Dominicaine (4,3 millions de touristes).

Compte tenu de sa possibilité d’attirer des devises étrangères désireuses de valoriser les atouts naturels de Cuba (patrimoine culturel, biodiversité, sable fin, eau turquoise) et de son effet d’entrainement sur les autres activités économiques (transport, artisanat, construction, production agricole, etc.), le secteur du tourisme est devenu l’un des piliers de l’économie cubaine. Cette évolution s’est manifestée entre 1990 et 2011 par une multiplication par 4 du parc hôtelier (380 hôtels, 55 872 chambres), par 8 du nombre de visiteurs (2,7 millions) etpar 10 du montant des recettes en devises (2,5 Mds USD). En moyenne sur la période allant de 2005 à 2010, les exportations des services ont représenté 70 % de l’ensemble des exportations cubaines (9,6 Mds USD en 2010). 23 % des exportations de services provenaient du secteur touristique, soit le deuxième poste d’exportation de services après les coopérants (estimées autour de 6 Mds USD).

En revanche, l’offre touristique à Cuba présente quatre grandes faiblesses : 1) sa très forte concentration territoriale (Varadero et La Havane reçoivent près de 60 % des touristes), 2) sa dépendance au marché canadien (40 % des visiteurs), 3) sa saisonnalité, et 3) son offre qui est principalement axé sur le tourisme balnéaire. Conscient de ce problème, les autorités cubaines ont établi une nouvelle stratégie pour diversifier la localisation et l’offre touristique. Huit régions de développement touristique sont devenues prioritaires (voir la carte) : 1) La Havane, 2) Varadero, 3) Jardines del Rey, 4) Nord du Camagüey, 5) Le nord d’Holguín, 6) le sud de la province Oriente, 7) le littoral centrale et sud et,8) les archipels des Canarreos.

Aussi, le nombre de lignes aériennes pourrait augmenter (objectif de 90 lignes aériennes régulières et vols charters contre 62 actuellement) tout comme celui des terminaux de croisières (La Havane, Cienfuegos et Santiago de Cuba) et des marinas. En 2010, M. Manuel Marrero Cruz, Ministre cubain du Tourisme, avait annoncé l’existence de 16 projets de golf en cours de discussion avec des sociétés étrangères. Enfin, 45 000 chambres supplémentaires pourraient être construites à l’horizon 2030 dans l’archipel de Jardines del Rey (région centre-nord de l’île, allant de la province de Villa Clara jusqu’à Camagüey). Et pour cause, la capacité d’absorption cubaine est très limitée. Elle a été saturée au moment de la visite à Cuba du Pape Benoit XVI en mars 2011. Les projections de croissance des visiteurs américains (grâce au programme people-to-people adopté en janvier 2011 par l’administration Obama) pourraient par conséquence se trouver bridées par les faibles capacités d’accueils (hôtels, location de voiture, sièges dans les bus et avions, etc.). L’autre enjeu pour les autorités cubaines sera de gérer au mieux les tensions sur la demande en eau et en électricité générées par l’augmentation du nombre de visiteurs étrangers.

Investissements directs étrangers à Cuba en 2011

Les stocks d’investissements directs étrangers (IDE) à Cuba atteignent 427 MUSD (0,7 % du PIB) en 2011 selon les données publiées par la CNUCED. Les flux d’IDE entrants redémarrent en 2010 après un net tassement en 2008 et 2009. Ils s’établissent à 110 MUSD (contre 86 MUSD en 2010) ; soit le niveau le plus élevé depuis l’ouverture du pays aux IDE en 1995. Les IDE sont portés par les grands projets d’infrastructures (restauration du port de Mariel, etc.). Cuba continue de représenter qu’une part négligeable des stocks et des flux d’IDE mondiaux (respectivement 0,006 % et 0,007 % en 2011).

Pour l’année 2011, la CNUCED récence 5 projets « greenfield » à Cuba contre 8 en 2010 et un pic à 12 en 2009. Sur l’ensemble de la région Caraïbes, la CNUCED récence 73 projets « greenfield » (63 projets en 2010). A la mi-juin 2012, la CNUCED comptabilise pour Cuba 61 accords internationaux d’investissement[1] (73 à la mi-mai 2011) dont 58 traités bilatéraux sur l’investissement et 3 traités sur la double imposition.

La Directrice des finances du ministère du Commerce extérieur et des Investissements étrangers, Mme Yamila Fernandez del Busto, a annoncé un réexamen, avant la fin de l’année 2012, des conditions d’accueil des investissements étrangers à Cuba. L’assouplissement de la loi 77 (1995) pourrait favoriser les entrées de capitaux en complément des investissements nationaux (8 % du PIB en 2010 contre une moyenne de 22 % pour la région Amérique latine et Caraïbes). Qui plus est, une réforme du code du travail serait également à l’étude. Néanmoins, le climat des affaires reste pénalisé par les lenteurs bureaucratiques et le durcissement des contrôles.

[1] Accords signés et ceux qui sont en cours de négociations

Echec de la prospection pétrolière menée par le consortium entre Petronas (Malaisie) et Gazpromneft (Russie)

Le forage conduit par le consortium entre Petronas (Malaisie) et Gazpromneft (Russie) n’a pas abouti à la découverte de pétrole en quantité commercialement viable. Selon le communiqué de l’entreprise publique cubaine Cupet, paru dans le journal Granma, les entreprises pétrolières Petronas et Gazpromneft continuent néanmoins d’évaluer les informations collectées lors du forage. Ce nouvel échec est un coup dur porté aux espoirs de trouver du pétrole en quantité suffisante dans les eaux territoriales cubaines. Déjà le 5 juin 2012, le consortium mené par Repsol (Espagne), en partenariat avec Statoil (Norvège) et OVL (Inde), était tombé sur un puits sec. Dans la foulée, Repsol annonçait la fin de ses opérations d’exploration à Cuba. A présent, toutes les attentes se reportent sur les forages qui seront menés par l’entreprise vénézuélienne PDVSA.

La zone d’exploration cubaine qui s’étend sur 112 000 km² a été divisée en 59 blocs d’exploration dont 22 déjà attribués (notamment à Statoil, Repsol, OVL, PDVSA, Petronas, Petrovietnam et Sonangol). Selon les autorités cubaines, les réserves pétrolières en eaux profondes atteindraient 20 milliards de barils contre seulement 4,6 Mds de barils pour l’US Geological Survey. Pour explorer ses réserves potentielles, la plateforme Scarabeo-9 a été spécialement conçue par SAIPEM, filiale de l’entreprise italienne Eni S.P.A. La plateforme répond aux contraintes de l’exploration pétrolière dans les eaux territoriales cubaines (profondeur, spécificité géologique, puissants courants, respect de l’environnement et exigences de l’embargo qui interdit à tout matériel exporté à Cuba de contenir plus de 10 % de composants américains). Scarabeo-9 a été contractée pour opérer à Cuba jusqu’en juillet 2013.

Investissements publics pour accroitre la production de riz à Cuba

Cuba prévoit d’investir 450 MUSD au cours des 4 prochaines années afin d’augmenter la production nationale de riz à l’horizon 2016. Dans cette perspective, 108 MUSD devraient être débloqués en 2012. Ils serviront à améliorer les équipements agricoles.

Depuis quelques années, Cuba et le Vietnam ont développé une coopération technique dans ce secteur : elle vise à ranimer la filière cubaine de riz. Les premiers résultats sont positifs puisqu’en 2011, la production de riz progresse de 43,7 % sur un an pour atteindre 459 700 t. Avec 383 200 t récoltés en 2011 (+43,1 % sur un an), le secteur non étatique contribue pour 83 % à la production nationale. Les petits exploitants privés fournissent 299 900 t et les coopératives, 83 300 t. Quant au secteur étatique, il demeure marginal avec 76 500 t. Le fruit de la production cubaine revient essentiellement à l’Etat (356 500 t) puis dans un deuxième temps, aux exploitants : 68 700 t en autoconsommation et 13 000 t vendues sur les marchés libres. En outre, selon Lázaro Díaz, directeur général de l’entreprise publique GNG (Grupo Nacional de Granos), le rendement atteint  4,1 t/ha  en 2012 contre 3,2 t/ha un an plus tôt. Tout comme la production, la surface totale des rizières s’accroit entre 2010 et 2011 (+23,3 %). La superficie occupée par le secteur non étatique progresse (+30 %, à 156 200 ha) alors que celle exploitée par le secteur non étatique se réduit (-11 %, à 21 300 ha). Conséquence, 88 % de la surface totale (177 500 ha) est occupée par le secteur non étatique. Les rizières se situent dans les provinces de Granma, de Camagüey, de Sancti Spíritus, de Pinar del Río, de Las Tunas, de Ciego de Ávila et de Cienfuegos.

Malgré la hausse de la production, Cuba reste très dépendant des importations de riz. En 2011, le pays a importé 413 910 t de riz (237 MUSD), soit près de la moitié de sa consommation. Le Vietnam est le principal fournisseur du pays et le 2ème partenaire commercial asiatique (287 MUSD en 2010). Cette dépendance est d’autant plus sensible que le riz est la denrée de base dans l’alimentation cubaine. Dans ce contexte et avec des finances publiques sous tensions, Lázaro Díaz rappelle l’enjeu : « chaque tonne produite dans le pays permettra à l’État d’économiser 500 000 USD d’importations ». Reste alors à savoir si cette énième stratégie de relance du secteur agricole, et dans ce cas du riz, permettra réellement à Cuba de gagner en autosuffisance.

L’Assemblée Nationale du Pouvoir Populaire (ANPP) adopte le projet de loi fiscale

L’Assemblée Nationale du Pouvoir Populaire (ANPP) a adopté le 13 juillet 2012, le projet de loi fiscale. Une fois publiée dans le journal officiel « gaceta », le nouveau texte remplacera la loi n°73 datant de 1994. Cette dernière est devenue obsolète avec l’émergence du secteur privé.

La nouvelle loi fiscale ajoutera au système fiscal cubain 7 nouveaux impôts aux 9 déjà existants, à savoir : impôts sur 1) les terrains agricoles et forestiers restés en friche ; 2) l’utilisation et l’exploitation des plages ; 3) le versement autorisé des eaux résiduelles dans les bassins hydrographiques ; 4) l’utilisation et l’exploitation des baies ; 5) le droit d’utiliser les eaux terrestres, ressources forestières et faune ; 6) les ventes de biens et services et ; 7) une taxe territoriale afin de financer le développement local.

La nouvelle loi comprendra des mesures incitatives (taux d’imposition minoré de 50 % pour les activités agricoles privées, exonérations fiscales de 2 à 4 ans pour les agriculteurs privés et de 5 ans pour ceux qui construiront eux même leur logement, baisse en 5 ans du taux d’imposition de la main d’œuvre qui passera de 25 % à 5 %, baisse du taux d’imposition sur les 3 premières tranches de revenus, etc.) afin d’encourager les sphères économiques jugées prioritaires (agriculture, construction, embauche dans le secteur privé). Elle comprendra aussi des dispositifs dissuasifs pour notamment limiter l’accumulation et protéger l’environnement.

Lorsqu’elle entrera en vigueur, la nouvelle loi fiscale ne sera plus seulement un simple outil pour financer les dépenses publiques mais deviendra un véritable instrument de politique économique.

Les nouvelles dispositions douanières sur les importations à Cuba de marchandises à caractère non commercial

Trois nouvelles résolutions (n°122/2012, n°222/2012 et n°223/2012) ont été publiées dans le journal officiel (gaceta n°30) du 2 juillet 2012. Elles concernent les importations par des particuliers de marchandises sans but commercial (bagages de voyageurs et les envois postaux aériens et/ou maritimes). Ces nouvelles dispositions entreront en vigueur le 3 septembre 2012.

La résolution n°122/2012 des Douanes « Aduana General de la República », unifie des dispositions déjà existantes (règlements n°15 du 3 septembre 2007 et n°269 du 5 novembre 2008), sans abroger la résolution n°11/2007 des Douanes qui permet l’exemption de paiement par les passagers des bagages inférieurs à 25 kg (effets personnels) et les colis de médicaments inférieurs à 10 kg. Aucun nouvel élément n’est ajouté au nouveau texte :

  • Adoption de l’équivalence valeur/poids (1kg = 10 pesos)[1] pour les produits divers (chaussures, vêtements, aliments[2] , produits de ménage, produits de soins personnels, parfums, etc.).
  • Les autres produits seront taxés au prorata de leur valeur (facture d’achat ou déclaration de valeur ou en fonction de la liste de prix préétablie par les douanes).
  • Les droits de douane applicables sont plafonnés à une valeur d’importation de 1 000 pesos pour les bagages et 200 pesos pour les envois postaux.

Les deux autres résolutions émises par le ministère de Finances et Prix : résolution n°222/2012 sur les bagages de passagers et la résolution n°223/2012 sur les envois postaux, apportent les éléments nouveaux qui concernent essentiellement la monnaie pour le paiement des tarifs.

La résolution 222/2012 reprends des éléments des dispositions déjà existantes[3], à savoir : (i) limite à 100 kg pour les bagages de passagers ; (ii) exemption de paiement de droits douaniers pour les importations non commerciales inférieur à 5 kg et ; (iii) maintien du paiement des tarifs en « pesos nationaux » (CUP) pour les Cubains et étrangers résidents permanents mais seulement lors de leur premier voyage. A partir du second voyage au cours de la même année calendaire, les tarifs sont libellés en « en pesos convertibles » (CUC) mais payable en CUP, au taux de change en vigueur (actuellement 1 CUC = 24 CUP). Autres changements, l’établissement d’une  nouvelle grille tarifaire : ils passent à 100 % pour les bagages allant de 5 kg à 50 kg, contre 150 % auparavant pour ceux allant de 25 kg à 50 kg. Pour les bagages supérieurs à 50 kg, les tarifs se maintiennent à 200 %.

La résolution n°223 concerne les envois postaux par voies aérienne et maritime, sans caractère commercial, reçus par des personnes physiques. Elle maintient : (i) la limite de 20 kg/envoi ; (ii) l’exemption de paiement pour les 3 premiers kilos et ; (iii) le tarif de 100 % pour les colis de 3 à 20 kg.

A présent, le paiement de ces tarifs est en CUC alors qu’il était en CUP auparavant. Conséquence, les nouveaux règlements vont de facto multiplier par 24 les droits de douane des envois postaux, et des articles importés par les Cubains qui résident au pays et les étrangers résidents permanents et cela à partir de leur 2ème voyage dans la même année calendaire. Ces mesures auraient notamment pour objectif de réduire le négoce informel de marchandises arrivant par voie postale et emmenées par les « mulas », personnes se rendant dans des pays tiers (Equateur, Panama, etc.) afin d’acheter des marchandises pour les revendre à Cuba. Ces trafics ont sensiblement augmenté ces dernières années, répondant à la demande croissante des nouvelles activités privées en l’absence d’un marché interne de grossistes. Sans cadre légal ni logistique, ces réseaux continueront néanmoins d’utiliser les moyens disponibles : voyages, envois postaux et frets (maritimes et aériens) avec un but non commercial affiché ; tout en allant à l’encontre des monopoles de l’Etat sur les importations de marchandises à caractère commercial. Les nouveaux tarifs, plus chers, contribueront à ralentir l’essor de ces réseaux, car moins rentables, et généreront des recettes supplémentaires pour l’Etat.

Ces nouvelles dispositions douanières interviennent au moment où a été annoncée la possibilité pour un particulier d’envoyer directement des colis par voie maritime depuis les Etats-Unis. C’est une première depuis 50 ans. Avant l’annonce d’International Port Corp (IPC), seule les envois ponctuels de marchandises à caractère commercial (produits agricoles et médicaments) pouvaient être transportés par voie maritime entre les Etats-Unis et Cuba. Le bateau “Ana Cecilia” a relié Miami à La Havane, en transportant des marchandises à caractère humanitaire, destinées à des particuliers. L’opération est réalisée par l’entreprise américaine International Port Corp (IPC) qui a obtenu une licence du bureau de contrôle des avoirs étrangers (OFAC). La liaison maritime sera hebdomadaire. Le correspondant cubain pour livrer les colis sur le territoire national est l’entreprise publique Cubapack. Les délais seraient d’une semaine à La Havane et de deux semaines pour le reste du pays. Le coût annoncé est de 5,99 USD par livre envoyée, soit 13,29 USD/kg.

[1] Le texte de la résolution mentionne « pesos », pouvant signifier « pesos nationaux » (CUP) ou « pesos convertibles » (CUC), en fonction des cas spécifiés dans les résolutions du ministère des Finances et Prix.

[2] La remise de la taxe douanière sur l’importation de produits alimentaires (à des fins non commerciales) s’est produite le 18 juin. Instaurée en 1979, la taxation avait été suspendue à la suite des dégâts causés par les ouragans Gustav, Ike et Paloma en 2008.

[3] Les articles humanitaires autorisés sont : les vêtements, les aliments, les médicaments, les équipements électroménagers, les meubles de maison, les matériaux de construction, les pièces de véhicules et les générateurs électriques.



Enrique   |  Politique, Société, Économie   |  12 20th, 2012    |