Le mirage des réformes à Cuba

Le 5 octobre dernier Isbel Díaz, militant de l’Observatoire Critique, une organisation de la nouvelle gauche cubaine, a été menacé par des officiers de la police à La Havane. Il avait commis le délit de tenir un débat public sur le nouveau Code du Travail, que le gouvernement espère adopter bientôt.

Paradoxalement, le Parti Communiste a demandé aux travailleurs de discuter la réforme de l’ancienne loi. Pourtant, les discussions devaient se tenir à huis clos sous la surveillance des syndicats – tous contrôlés par le gouvernement –, pas dans l’espace publique.

L’intimidation de Díaz n’est pas rare. Les autorités cubaines ont été condamnées maintes fois par des organismes internationaux à cause de la violation des droits de l’homme. Cet incident devient cependant remarquable car il se passe tandis que le gouvernement et la presse officielle s’affairent à vanter les réformes en cours.

De la république au modèle chinois

La vie des Cubains a été menée par un régime autoritaire pendant presque 55 ans. Lors du triomphe de la Révolution, Fidel Castro avait promis de tenir des élections démocratiques dans les plus brefs délais. Il n’a jamais été fidèle à sa promesse.

Le dernier président cubain élu avait été déchu par un coup d’État en 1952. La démocratie avait eu une vie très courte à Cuba, bouleversée depuis 1902 par une dictature, une décennie d’instabilité politique – pendant les années 30 – et finalement la tyrannie de Fulgencio Batista.

Bref, l’esprit démocratique n’a jamais eu le temps de mûrir dans l’île. Après des années de propagande communiste contre « les méfaits » de la démocratie un peu partout dans le monde, beaucoup de Cubains s’en méfient.

Le président Raúl Castro a entamé des réformes économiques en 2008, quand il a remplacé son frère aîné. Il a permis aux Cubains, par exemple, d’accéder aux hôtels et de voyager sans une permission officielle, ce qui était interdit auparavant malgré la Constitution. Le Général a promu aussi des changements dans l’agriculture, le travail autonome, le secteur immobilier, les sports…

Néanmoins, il a refusé d’ouvrir la porte à des réformes politiques. Il a promis de quitter la présidence en 2017, mais il fut le Parti Communiste – c’est-à-dire lui et l’élite régissant le pays depuis des décennies– qui élut son successeur. En s’attachant à la méthode autoritaire de transfert de pouvoir, Raúl Castro confirme son penchant pour le modèle chinois –pas très éloigné de celui de leurs voisins Nord-coréens.

La mascarade

Le gouvernement cubain tient un contrôle strict de l’information et réprime, d’une façon plus ou moins ouverte, toutes les manifestations de dissidence politique. Pourtant, ses porte-paroles célèbrent l’avancement des réformes économiques conduisant – selon la version officielle – à un socialisme plus efficace. Et certains y croient.

Soyons honnêtes. Il n’y a pas de vraies réformes à Cuba, mais le remaniement d’un système façonné à l’image d’une élite conservatrice et corrompue, essayant de se perpétuer au pouvoir. Ils promettent maintenant un socialisme prospère. Ils mentent. Ils l’ont déjà fait mille fois.

Les menaces contre les militants de l’Observatoire Critique démontrent encore une fois le caractère profondément antidémocratique du Parti Communiste cubain. Nous ne devrions pas être surpris. Le régime stalinien cubain a une longue histoire de répression contre des intellectuels, des artistes et des opposants toutes les idéologies confondues.

Les nouvelles du Sud
L’Amérique latine vue par un journaliste latino-américain résidant au Canada


Enrique   |  Actualité, Politique, Société   |  11 1st, 2013    |