Le voyage de Garcia Lorca à Cuba

D’après certains articles parus dans la presse à propos de la visite de Federico Garcia Lorca à Cuba, son séjour dans notre pays fut des plus agréables. Ce poète majeur de la littérature espagnole du XXe siècle, qui appartenait au mouvement littéraire La génération de 1927, a fait le récit de son séjour à Cuba dans ses écrits.

Garcia Lorca est né à Fuente Vaqueros, un village près de Grenade, le 5 juin 1898. Il fut fusillé le 5 août 1936 pendant la Guerre civile espagnole, sur un chemin entre les villages de Viznar et Alfacar, pour sa sympathie pour le Front populaire et pour son homosexualité.

C’est alors qu’il se trouvait à New York en 1929 que Don Fernando Ortiz l’invita à Cuba, au nom de l’Institution hispano-cubaine de la Culture qu’il présidait, afin qu’il vienne donner des conférences sur certains aspects novateurs de la culture. Garcia Lorca était au courant, par des intellectuels cubains avec lesquels il correspondait, tels José Maria Chacon y Calvo, Enrique Loynaz et Enrique Hernandez Cata, que le mouvement avant-gardiste – qui faisait le lien entre l’esthétique et le politique – se développait dans l’île. C’était également l’époque de grands intellectuels comme Nicolas Guillen, Jorge Mañach, et Agustin Acosta.

Garcia Lorca arriva à La Havane le 7 mars 1930 où il fut accueilli par un groupe d’intellectuels, dont Juan Marinello, qui dira ensuite de l’auteur de La Maison de Bernarda Alba : « Il possède le pouvoir très apprécié d’évoquer les gens, dont certains sont très éloignés du présent. Tel le poète des Songes, c’est un animateur d’ombres magiques. »

Le poète logea à l’hôtel Union, dans la Vieille Havane. Très vite, il démarra son cycle de conférences, sur un style très convivial. L’une d’entre elles, qui avait pour thème les berceuses espagnoles, fut très appréciée du public et de la critique. Plusieurs de ces chants furent interprétées par Maria Tubau, accompagnée au piano par le poète andalou.

Au début du mois d’avril, il se rendit à Cienfuegos avec le couple Muñoz Quevedo. Auparavant, il fit une halte à Varadero pour se baigner dans les eaux vert-bleu de cette plage qui porte le nom d’une plage d’Andalousie. À Sagua la Grande, il donna la conférence La mécanique de la poésie au Théâtre principal ; à Caibarien, il disserta sur le poète Quevedo, puis il continua vers Remedios d’où il écrivit à ses parents pour leur raconter, sur un mode ludique, ses émotions au cours d’une chasse au crocodile, dont certains mesuraient entre 4 et 6 m de long.

De retour dans l’ouest du pays, il visita Pinar del Rio, où les spectaculaires paysages de Soroa et de Viñales le fascinèrent. De ce village, il écrira : « C’est un lieu magique où le temps s’arrête. »

Il ne fait pas de doute qu’il tomba sous le charme de Cuba. Il aimait, par exemple, se promener sur le Malecón (promenade de front de mer) de La Havane, dans les quartiers de Jesus Maria, de Del Monte et de San Isidro.

Pour lui, « La Havane était une grande Cadix, où il faisait très chaud et où les gens parlaient très fort », avec des églises et des couvents qui lui rappelaient ceux qu’ils avait vus tant de fois en Espagne, et des théâtres pour hommes seuls comme celui de l’Alhambra, qui faisaient rougir les dames de bonnes familles.

À La Havane, il écrivit “Asi que pasen cinco años” (Cinq ans peuvent passer ainsi) et “El publico”, une œuvre écrite à l’hôtel Union, dédiée à Carlos Manuel Loynaz.

À l’occasion, il déclara que chez les Loynaz – où il se rendait régulièrement – les heures passaient rapidement car l’ambiance se prêtait aux discussions sur la musique, la peinture, la poésie et le théâtre. En compagnie de Flor, d’Enrique, et de Carlos Manuel Loynaz, il fréquentait les restaurants les plus célèbres de La Havane élégante, comme Le Floridita et le Templete, où il buvait sa boisson favorite : un whisky soda.

Il apprécia particulièrement les plages de Marianao, ses cabarets nocturnes avec leurs musiques dansantes, des lieux très fréquentés par les étrangers, les prostituées, et les musiciens.

Il visita également Guanajay, Santa Maria del Rosario, Guanabacoa et Regla. Accompagné de Fernando Ortiz et de José Antonio Fernández de Castro, il se rendit à Santiago de las Vegas le 19 avril 1930 en réponse à une invitation du groupe artistique Euterpe, où il récita Romance de la luna, luna, et où il se laissa bercer par la musique traditionnelle cubaine.

Pour conclure, il donna une dernière conférence à La Havane L’architecture du cante jondo (chant gitan andalou) qui impressionna beaucoup le public. Il y affirmait que « ce chant est l’évocation de l’amour sous d’autres lunes et d’autres vents », et il appuyait la théorie que le cante jondo était purement andalou.

Sur la visite de Garcia Lorca à Santiago de Cuba, qui est parfois mise en doute, la Dr en Histoire Carmen Almodovar signale : « Camila Henriquez Ureña apporte les preuves de sa visite en affirmant qu’elle a connu le poète chez elle. Au cours de son séjour rapide et émouvant à Santiago, Garcia Lorca écrivit une dédicace sur le recueil Canciones (Chansons), daté et signé à Santiago, qu’il offrit à Juan Marinello. Il profita de son séjour dans la Ville héroïque pour donner une conférence devant des étudiants, invités par Max Henriquez Ureña. »

Federico Garcia Lorca a écrit un poème “Son” de noirs à Cuba dédié aux Cubains, que Santiago de Cuba a mis en musique : Oh Cuba ! Oh rythme de semences sèches !/ J’irai à Santiago. Oh taille chaude et goutte de bois !/ J’irai à Santiago./ Harpe de troncs vifs, caïman, fleur de tabac !/ J’irai à Santiago./ J’ai toujours dit que j’irais à Santiago/ dans une voiture d’eau noire./ J’irai à Santiago./ Brise et alcool dans les roues… J’irai à Santiago.

Angela Oramas Camero

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Video :

Son de Negros en Cuba por Fernando Barros



Enrique   |  Culture   |  06 26th, 2019    |