Les jardins urbains coopératifs de Cuba : solution à la crise alimentaire

Les jardins urbains coopératifs que l’île de Cuba a mis en place à la suite de l’effondrement de l’Union Soviétique pour mettre fin à une crise alimentaire pourrait être une réponse au problème de l’augmentation des prix de l’alimentation et une forme intéressante de programme « manger local ».

Après la chute de l’Union Soviétique en 1991, Cuba a planté des milliers de jardins coopératifs urbains pour compenser la diminution des rations de nourriture importées des pays de l’est. Aujourd’hui, après trois ouragans qui ont dévasté près de 30% des cultures dans les fermes de Cuba, le pays communiste se tourne à nouveau vers ses jardins coopératifs urbains pour faire en sorte que son peuple soit suffisamment nourri.

« Notre capacité à répondre est immédiate parce qu’elle est coopérative » a déclaré Miguel Salcines, directeur d’un jardin dans la banlieue d’Alamar à la périphérie de La Havane.

Miguel Salcines a déclaré qu’il dormait très peu alors que ses 160 membres de la coopérative se dépêchent de planter et de moissonner une grande variété de betteraves qui ne mettent que 25 jours pour pousser.

Près de 15% de la nourriture mondiale est cultivée dans des zones urbaines, d’après le Département de l’Agriculture des Etats-Unis, un chiffre que les experts s’attendent à voir augmenter avec l’augmentation des prix de la nourriture, la croissance des populations urbaines et les préoccupations environnementales.

Depuis qu’elles vendent directement leurs produits à leur communauté, les fermes urbaines ne dépendent plus des transports et sont relativement immunisées contre la volatilité des prix du carburant, un avantage qui prend de plus en plus de poids alors que les mouvements « manger local » se développent dans les pays riches.

A Cuba, les jardins urbains se sont transformés en parcelles vacantes, le long des parkings, dans les banlieues et même sur les toits des immeubles en ville.

Ils sont nés d’un plan militaire élaboré par l’île pour devenir autonome en cas de guerre. Les jardins se sont ensuite étendus au grand public en réponse à une crise alimentaire qui a suivi l’effondrement de l’Union Soviétique, le principal bienfaiteur de Cuba à l’époque.

Ils se sont avérés être très populaires, occupant 35 000 hectares de terres dans toute l’île. Même avant les ouragans, ils produisaient la moitié des légumes mangés à Cuba, qui importe environ 60% de sa nourriture.

« Je ne dis pas qu’ils ont la capacité de produire assez de nourriture pour toute l’île, mais pour des raisons sociales et agricoles, ils sont la réponse la plus adéquate à une crise » a déclaré Catherine Murphy, une sociologue américaine qui a étudié les jardins urbains de Cuba.

A Alamar, les membres de la coopérative obtiennent un salaire et partagent les profits du jardin, donc plus ils font pousser de légumes et de fruits, plus ils sont gagnants. Ils gagnent en moyenne 950 pesos, soit environ 42,75 dollars par mois, soit plus du double de la moyenne nationale, selon Miguel Salcines.

La coopérative qui a été lancée en 1997, produit désormais plus de 240 tonnes de légumes chaque année dans ses 11 hectares de terres, ce qui correspond environ à la taille de 13 stades de football.

Les jardins urbains vendent ce qu’ils produisent directement à la communauté, et en cas de nécessité ils font pousser leurs cultures de manière organique.

« L’agriculture urbaine va jouer un rôle essentiel pour garantir l’alimentation du peuple plus rapidement que les fermes traditionnelles » a déclaré Richard Haep, coordinateur à Cuba pour un groupe humanitaire allemand, Welthungerhilfe, qui soutient ce genre de projets depuis 1994.

Quand l’Union Soviétique s’est effondrée, les approvisionnements en pétrole à Cuba ont considérablement ralenti, ce qui a affecté les opérations agricoles du gouvernement. Les fertilisants chimiques ont été remplacés par du fumier et des engrais naturels.

Alors que dans les pays développés les produits organiques sont plus chers, à Cuba ils sont abordables en termes de prix. « Nous avons amené l’agriculture organique à un niveau social » a commenté Miguel Salcines.

Certains experts craignent que l’augmentation des prix mondiaux de la nourriture ainsi que les dégâts occasionnés par les ouragans encouragent Cuba à revenir sur la voie de l’agrochimie. Le gouvernement prévoit de construire une usine de fertilisants avec son allié riche en pétrole, le Venezuela.

Mais Raul Castro, qui remplace son frère malade Fidel Castro en tant que président, a aussi repris l’idée des jardins urbains lorsqu’il a mis en place une réforme visant à réduire les importations annuelles de nourriture de l’île.

Sandra BESSON


Enrique   |  Politique, Société, Écologie   |  02 12th, 2013    |