Le déclin de la démocratie : une prophétie sans alternative ?
Kyal Sin, in memoriam
Dans toute communauté humaine, il existe des différences – de traits, des idées et des valeurs – et des inégalités – de ressources, de droits, de pouvoir – entre ceux qui la forment. Ses membres vivent sous le risque permanent d’un conflit, entre les favorisés qui veulent préserver le statu quo et les défavorisés qui veulent le changer. La tension qui en résulte génère la recherche de moyens de réguler les conflits. Parce que chaque société nourrisse un désir de sécurité, de prospérité et de pouvoir. Celles-ci doivent être canalisées par la politique.
Le régime cubain établit des zones de sécurité dans les quartiers où vit son élite
Le Journal officiel publie un accord annonçant que certaines zones de La Havane seront contrôlées par la police politique.
Certains conseils populaires [districts] et certaines rues de la capitale cubaine deviendront des « zones spéciales » ou « zones gelées », sous le contrôle absolu du ministère de l’Intérieur (MININT), selon un accord publié le 24 février dans le Journal officiel de la République de Cuba.
Le Journal officiel ordinaire n° 20 a publié l’accord 8999/2021 du Conseil des ministres qui détaille une nouvelle et complète extension des « Zones et rues d’intérêt pour la sécurité et l’ordre interne de La Havane ». En bref, le document garantit une sécurité à toute épreuve dans les espaces où l’élite du pouvoir cubain vit, travail et se déplace. En outre, elle crée une justification légale pour réprimer toute forme de protestation devant les ministères et les institutions publiques.
En pleine crise sanitaire et économique, Sandro Castro, petit-fils de Fidel, se promène en voiture de luxe à La Havane
Dans la vidéo publiée sur les réseaux sociaux le 2 mars dernier, le jeune membre de la famille Castro dit : « Nous sommes des gens simples, mais nous devons sortir les jouets de famille que nous avons à la maison ». Il demande ensuite à la jolie fille qui l’accompagne de noter la vitesse de sa Mercedes Benz. La vidéo montre qu’il se déplaçait à 140 km à l’heure. Lire la suite »
Cuba. « La bible de la liberté pour le peuple »
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Entretien avec le site cubain « Diario de Cuba » de Floréal Melgar à propos du livre « Cuba : chroniques d’un cauchemar sans fin »
Nous avons chroniqué le mois dernier l’ouvrage de Floréal Melgar « Cuba : chroniques d’un cauchemar sans fin* », aux éditions L’Esprit frappeur.
Tout dernièrement, le site d’opposition au régime castriste « Diario de Cuba » a demandé un entretien à Floréal Melgar, par l’intermédiaire d’une de ses journalistes indépendantes, Rafaela Cruz, à l’occasion de la parution du livre. Nous publions ici la traduction française de cet entretien, ainsi que le lien** vers le texte d’origine pour les lecteurs de langue espagnole.
D’anciens officiers des Forces armées cubaines et du ministère de l’intérieur envoient une lettre aux militaires cubains
D’anciens officiers des forces armées cubaines et du ministère de l’intérieur ont envoyé, à l’occasion du 126e anniversaire du début de la guerre d’indépendance, un document aux militaires d’active dans lequel ils font appel à leur conscience pour qu’ils ne se joignent pas à la répression déclenchée par le régime ces derniers mois contre les opposants.
Le manifeste, signé entre autres par le général de brigade Rafael del Pino et le lieutenant-colonel Omar Ruiz Matoses, père des opposants Ariel et Omara Ruiz Urquiola, reconnaît que « si la pauvreté est répandue dans tout le pays, une caste corrompue d’officiers et de bureaucrates de haut rang a formé un État mafieux et vit à son aise ».
La criminalisation de l’opposition politique d’hier à aujourd’hui
Samuel Farber est né à Marianao, l’un des arrondissements de La Havane. Il est professeur émérite de sciences politiques au Brooklyn College (New York) [1] Dans ce texte publié sur le site La Joven Cuba, le 28 décembre 2020, il réinscrit dans une perspective historique la criminalisation actuelle de l’opposition politique par le pouvoir cubain. Cet article a été traduit en français et publié par le site À l’encontre le 31 décembre 2020.
Il existe des États antidémocratiques qui non seulement répriment l’opposition politique, mais aussi la criminalisent, un moyen très efficace d’éviter la diffusion et la discussion d’idées politiques qui divergent de l’idéologie au pouvoir. C’était le cas en Union soviétique et c’est toujours le cas dans les régimes qui ont adopté les principales structures du modèle politique soviétique, comme la Chine, le Vietnam et notre Cuba.
Ainsi, sous la direction du gouvernement cubain, les membres du Mouvement San Isidro [2] ont été arrêtés par la police sur la base d’accusations criminelles – prétendument pour avoir violé « le protocole sanitaire pour les voyageurs internationaux », adopté par le gouvernement pour lutter contre la pandémie Covid-19. Ils ont en fait été arrêtés pour des raisons politiques, pour avoir protesté en groupe et publiquement contre la répression du gouvernement à l’encontre de l’un de leurs membres. C’est un exemple typique de la façon dont le gouvernement cubain traite la critique : en remplaçant le langage politique par le langage administratif policier.
Capitalisme et démocratie : un débat récurrent
Dans les sciences sociales, il est courant d’entrer dans des extrêmes – épistémologiques et politiques – qui emprisonnent la réalité dans des schémas manichéens. Paradoxalement, ces extrêmes coïncident du point de vue d’une téléologie explicative qui ignore les processus et les sujets réels, situés dans le contexte socio-historique. Les lectures idéalistes radicales abondent, qui nient la réalité complexe et dynamique des sociétés modernes, pariant sur des utopies déconnectées des processus réels. Il existe encore des visions affirmatives du statu quo, qui établissent des causalités mécaniques entre des phénomènes qui coïncident dans le temps et l’espace, mais qui appartiennent à des dimensions différentes du social. Le domaine intellectuel, avec ses confréries d’apologistes et d’adversaires dogmatiques de la Modernité libérale, est un bon exemple de ce que je mentionne ici.
Marta María, militer pour le féminisme à Cuba. Être activiste féministe, mère et journaliste indépendante cubaine
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À 43 ans, cette militante féministe, battante et critique, cherche à travers ses articles et son mode de vie à tendre vers une Cuba plus juste et moderne, régie par l’équité. Même si la Révolution a fait avancer les droits des femmes, il s’agit aujourd’hui, selon elle, d’ouvrir de nouveaux espaces d’échange et de débat, hors des organisations de masse officielles.
On arrive chez elle dans la matinée, au troisième étage, dans un appartement baigné de lumière. Elle nous ouvre la porte alors qu’elle allaite Nina, un joli bébé au regard bleu et profond, prénommée ainsi en hommage à Nina Simone. Marta María a les cheveux attachés, elle ne porte pas de soutien-gorge et par l’encolure du tee-shirt apparaît un cœur tatoué sur sa poitrine. Elle s’excuse pour le désordre, qui n’a rien de bien terrible. À l’entrée de la cuisine, un poster : « Insistez pour déconstruire l’idée de l’amour ». Marta nous invite à nous asseoir au sol, là où Nina aime jouer, pendant que la petite essaye d’entrer par la fenêtre de sa maisonnette en carton, couverte de pages du journal Granma.