Cuba, le retour des années grises entre le manque de perspectives et la crise alimentaire
Fidel Castro est décédé il y a deux ans. Son frère Raúl a cédé le pouvoir il y a un peu plus de six mois. Le castrisme s’efface lentement. Le nouveau président de Cuba, Miguel Díaz-Canel, homme discret, peine à offrir des perspectives au pays et à séduire ses compatriotes. Les Cubains subissent de plein fouet, particulièrement à La Havane, une terrible crise alimentaire.
Cuba dans l’attente de sa nouvelle constitution: entre changements et continuité
L’année 2018 a sans doute marqué une date importante dans l’histoire cubaine : les 21 et 22 juillet, l’Assemblée nationale du pouvoir approuvait en session ordinaire le projet de la nouvelle constitution nationale. Ainsi, les institutions politiques de la révolution castriste, dans son ensemble, sont entrées dans une nouvelle ère de son évolution, plus en accord avec les enjeux socio-politiques du monde actuel.
“La transparence du temps” de Leonardo Padura : un instantané cubain
Le nouveau roman de Leonardo Padura met en scène encore une fois son personnage préféré : Mario Conde, ancien policier désabusé, libraire désespéré et bientôt sexagénaire dépité.
Déjà dans Mort d’un chinois à La Havane, Conde traînait sa nostalgie. Ici, l’âge n’arrange pas les choses. Conde se morfond, voit ses amis partir un par un, quitter La Havane et son rhum, ses quartiers pittoresques pour rejoindre des membres de leur famille aux États-Unis. C’est dans ces conditions que Conde reçoit la visite d’un ancien ami : Bobby, qu’il fréquentait au lycée. Bobby, homosexuel caché, n’a pas eu une vie simple mais qui a fini par réussir. La description des années de lycée et de jeune adulte de cet homme dans un pays pas franchement ouvert à l’homosexualité fait d’ailleurs frémir le lecteur.
Henri Cartier-Bresson à Cuba
Le jeune Cartier-Bresson fait escale à La Havane en route pour le Mexique. Il arrive à Cuba avec son Leica de fabrication allemande accroché à son cou. Il l’avait acheté à Marseille en 1930. Cet appareil photo fut associé par la suite à son nom et à son travail de photographe.
La Havane, 1934. Henri Cartier-Bresson (1908-2004) arrive au port de La Havane. La chaleur des tropiques l’oblige à acheter un panama. Il pense : « À cette heure-ci, dans un restaurant du Montparnasse pluvieux et surréaliste, Joséphine Baker chante avec passion J’ai deux amours sur un rythme de charleston. » À l’intérieur d’un bar, près du port, un juke-box diffuse la musique contagieuse du son Echale salsita, d’Ignacio Piñeiro, interprétée par le groupe Septeto Nacional. L’espace d’un moment, Cartier-Bresson croit reconnaître dans la mélodie qu’il écoute pour la première fois des mesures semblables à celles des airs que chante l’inimitable Joséphine Baker à Paris et à New York.
Canek Sánchez Guevara : l’indocile héritier
Anarchiste, écrivain, punk, photographe ou graphiste : bien des mots pourraient décrire Canek Sánchez Guevara. Si son tempérament et son goût pour le voyage rappellent son légendaire grand-père, l’homme n’a jamais voulu qu’on le considère comme « le petit-fils du Che » : impossible, répétait-il, d’incarner ce pantin exemplaire tant attendu par le régime. Il choisit dès lors de s’éloigner de Cuba, en quête d’anonymat.
Fils de la Péruvienne Hilda Guevara Gadea, aînée du premier mariage du Che, et d’Alberto Sánchez Hernández, un communiste mexicain réfugié à Cuba, Canek — « serpent noir », en langue maya — naît en 1974 dans une maison havanaise du quartier de Miramar. La petite famille voyage beaucoup : entourée de réfugiés politiques et d’activistes locaux, elle s’installe à Milan, Barcelone et Mexico pour finalement rentrer à Cuba. Canek y reste jusqu’à la mort de sa mère ; il a alors 22 ans et décide d’abandonner l’île pour rejoindre la ville d’Oaxaca, au Mexique. « En marge de tout principe politico-idéologique, il y a deux choses que j’admire grandement chez Ernesto Guevara : son internationalisme et sa témérité, desquels je me suis sans doute nourri », dira-t-il en 2012, au cours d’une interview pour le quotidien brésilien La Folha de Sao Paulo.
L’anarchisme en Amérique latine
Je vais essayer de donner ici une introduction globale à l’histoire, aux caractéristiques et aux perspectives de l’anarchisme sur notre continent. Pour cela, j’envisagerai quatre moments historiques :
1) Le XIXe siècle : ses origines européennes et son enracinement parmi nous.
2) Le premier tiers du XXe siècle : l’essor de l’anarcho-syndicalisme et la présence libertaire dans les luttes sociales, les dynamiques politiques et la scène culturelle et intellectuelle sur le continent.
3) Son reflux et sa quasi-disparition, des années 1930 au début des années 1990.
4) De la fin du XXe siècle au XXIe siècle : l’espoir d’une résurgence face aux défis des nouvelles réalités et l’épreuve du potentiel de l’idéal libertaire.
Cette chronologie ne cherche pas à établir exactement le déroulement de ce qui s’est passé dans nos pays, car les circonstances ont été différentes dans chacun d’eux. Pour cette raison, la perspective devra être ajustée à chaque contexte spécifique.
Un obstacle important pour la connaissance de l’anarchisme continental est le silence imposé par les historiens officiels, qu’ils soient positivistes, libéraux ou marxistes. Heureusement, il existe un texte précurseur d’une valeur extraordinaire, la préface intitulée « Anarchisme latino-américain », écrite par Angel Cappelletti en 1990, pour le volume de compilation intitulé L’Anarchisme en Amérique latine.
L’anarchisme à Cuba. Une pensée vraiment révolutionnaire
Communication présentée à la table-débat de Trinchera Abierta dans son édition du mois d’août, qui s’est tenue au Centre social Abra de La Havane.
La lutte pour l’indépendance, l’anarchisme et Martí
L’anarchisme fait partie du mouvement révolutionnaire mondial. Cela peut sembler un truisme pour certains, mais à Cuba, il faut l’expliquer à la majorité des gens. Il faut rappeler que dans l’histoire de la Révolution cubaine, à partir de 1961, l’anarchisme a été assimilé à la contre-révolution, c’est-à-dire qu’il a été considéré comme contre-révolutionnaire. Par conséquent, il est très important de mettre en évidence et de souligner la pureté révolutionnaire de l’anarchisme. Ses principales figures fondatrices ont donné leur vie pour la cause. L’anarchisme et le socialisme international ont le même substrat, qui est la conscience de la classe ouvrière. Par conséquent, l’anarchisme ne peut être méprisé, car il s’inscrit dans une riche tradition de la classe ouvrière.
Franco et Fidel, ennemis cordiaux
Après la mort de Franco, le correspondant de l’agence Efe à La Havane envoya une dépêche, reprise par certains des plus prestigieux journaux du monde et qui disait ceci : « Quelques heures après l’annonce de la mort du général Franco, le gouvernement révolutionnaire de Cuba a décrété un deuil officiel de trois jours. Depuis jeudi, les drapeaux ont été mis en berne sur tout le territoire cubain. Le président de la République, M. Osvaldo Dorticós, a adressé un message de condoléances au président du gouvernement espagnol, Carlos Arias Navarro (…). » Quand vous lisez cela, vous avez l’impression qu’il y a soit un malentendu, soit une erreur dans le texte. Ce n’était pas le cas. Le Cuba de Fidel Castro a en effet rendu hommage au dictateur comme aucun autre pays ne l’a fait, bien qu’il ait tout mis en œuvre pour que l’information demeure discrète, ce qui permettait tout à la fois de rester en bons termes avec l’Espagne et d’éviter un scandale international. Ce geste a pris un relief plus important encore l’année suivante, à la mort de Mao Zedong, le gouvernement cubain n’ayant pas porté la même attention envers le dirigeant communiste chinois. Ce fut là le dernier chapitre d’une relation particulière et choquante entre deux dictateurs idéologiquement aux antipodes, qui décidèrent d’agir avec un pragmatisme « souterrain » et une complicité qui ont suscité un énorme intérêt chez les historiens et les politologues.
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Méditation environnementale à la plage de la Concha à Marianao
Pour Juanma Agulles, pour ne plus perdre la mer.
Le lever du soleil sur la plage de La Concha, le littoral de l’ancienne municipalité de Marianao, à l’ouest de La Havane, est l’un des moments de l’épiphanie dont je peux encore me réjouir, où je peux sentir le rythme de ma minuscule existence dans sa transe de purification précaire et où je me réinvente.
J’aime le lever du soleil sur la plage de La Concha, comme le lever du soleil sur une montagne ou dans un désert, parce qu’il me permet de ressentir éphémèrement le devenir de l’immense totalité qui nous entoure avec force.
Cette plage à l’aube m’incite à imaginer avec une profonde superficialité ce qu’était ce monde avant que nous ne soyons devenu un fléau dévastateur. Ce fléau que sont devenus les humains au cours des deux derniers siècles d’existence.
4e Printemps libertaire de La Havane (1er appel)
Organisé par : le Centre social et la bibliothèque libertaria ABRA, l’Atelier libertaire Alfredo López et le Garde-forestier
Ils invitent au 4e Printemps libertaire de La Havane, entre le 4 et le 11 mai 2019, un espace/temps que nous organisons depuis plusieurs années, nous les anarchistes qui habitont cette ville et leurs amis, pour préfigurer en anticipation palpable le monde que nous voulons sans inspecteurs, marchands, agents de l’insécurité de l’Etat et employés d’argent sans morale.
Défier l’impérialisme quotidien et encourager l’espoir à Cuba et dans le monde. Pour guérir notre moi intérieur de tant de ministères. Pour élargir les espaces pour nos intimités. Pour se battre sur le terrain du désespoir et de l’isolement, qui sont les ingrédients fondamentaux de toute défaite durable. Face à de tels ennemis, il ne suffit pas de les nommer pour dissiper leur oeuvre.